dimanche 28 novembre 2010

2 Jours a Tripoli

Mardi soir, comme souvent c'est League des Champions. Le Kamelot est blindé d'anglais et on se tape un Chelsea-Zilna tout moisi. Katuka sors a la mi-temps et honnêtement le sois disant « black Zidane » c'est pas encore ça. Les serveurs s'étonnent que je reste pas boire un dernier Jack avec eux mais je me lève tôt le lendemain.
Mercredi c'est départ pour Tripoli, la 2ème ville du pays à 90km au nord de Beyrouth. Je prends un mini bus et regarde le paysage le long de la route côtière. Beyrouth, Byblos et pas mal de bleds dont je connais pas le nom. La méditerranée baigne tout ca et ça fait du bien de sortir de Beyrouth et de voir un peu de vert. Après deux bonnes heures de route on arrive à Tripoli. La première chose que l'on voit c'est le stade. Puis les grandes avenues qui entrent dans la ville. Je descend du bus à un énorme rond point.
Dessuite la différence avec Beyrouth est frappante. Ici la majorité des habitants sont musulmans, la ville n'a pas l'air européen de Beyrouth. Je remonte vers la place centrale. Une grande tour avec une horloge domine un petit jardin public, le centre de Tripoli. Sur beaucoup d'immeubles les photos de Rafik et Saad Hariri côtoient les drapeaux bleus de leur parti, le courant du futur.
Première mission trouver une auberge, comme souvent le Petit Futé n'est pas à jour et les prix sont très différents de ceux indiqués dans mon guide. Il est possible qu'à mon retour ils aient droit à un mail moyennement sympa. Bref je me retrouve dans une petite pension au mobilier super kitch. Les prix sont abordables et ca à l'air propre. Je pose mon sac et dégaine mon appareil photo. Il est déjà 14h, je décide de faire l'impasse sur les souks dont on m'a dit qu'il valait mieux y aller le matin.
C'est vraiment l'Orient que l'on imagine, café old school ou les hommes jouent au Bagamon en tirant sur leurs narghilehs, cireurs de chaussures à tous les coins de rue (il y'en à aussi à Beyrouth mais beaucoup moins), tous les hommes ont dan les mains un espèce de chapelet qu'ils égrainent sans cesse. Beaucoup de minarets qui dépassent des toits, j'entends l'appel à la prière, c'est autre chose que les cloches électroniques qui me réveillent tous les matins à Beyrouth.
Je pars vers le château St-Gilles, la citadelle qui domine la ville. Le château à été construit par Raymond de St-Gilles, comte de Toulouse (et ouais on est partout, même ici!) pendant la première croisade. La colline ou il est situé s'appelle le Mont pèlerin, c'est pas très haut mais ça monte sec. Le long des escaliers je croise des chats, beaucoup de chats, dans tous les coins... C'est le royaume des chats de gouttières ici, peut être que je devrais songer à venir habiter dans le coin. Il y'a des gamins qui courent partout, ils me demandent si je suis américain. Faut dire que grand blond au yeux bleus avec mon appareil photo dans la main j'ai quand même l'air d'un gros touriste.
La forteresse est plutôt bien conservée, il y'a des travaux en cours mais je ne vois personne bosser. Je me ballade à l'intérieur, c'est plutôt sympa de pas avoir de sens de visite ou de guide et de pouvoir déambuler ou on veut. Encore beaucoup de chats que je dérange et qui partent en courant après avoir feulé à mon approche.
J'arrive sur les remparts et là c'est magique. La vue est juste énorme. A mes pieds la vieille ville de Tripoli, les souks, que des vieux bâtiments au toits plats. Le minaret carré de la grande mosquée qui se dresse au milieu. Plus loin les grands immeubles modernes et la mer, tout au bout, super bleue.
Je reste là plus d'une heure à fumer des clopes en regardant le soleil qui décline. On est mieux là qu'a prendre des coups de pieds dans les noix.
Retour à l'auberge un peu fatigué, je rencontre mon voisin de dortoir, un finlandais avec un nom absolument imprononçable. On décide de sortir bouffer tout les deux. Petit resto, un demi poulet chacun accompagné de frites d'un assortiment de légumes et des meilleurs falafels de ma vie. A faire passer « Chez nous les libanais » et le libanais du Mirail (les meilleurs de Toulouse je pense) pour de vulgaires Mac Do. J'en commende de nouveau, c'est mortel, je m'en ferais péter le bide. Le tout arrosé au Pepsi car à la différence de Beyrouth c'est chaud de trouver de l'alcool à Tripoli.
La nuit est tombée, on s'installe en terrasse avec un thé à la menthe et un narghileh. Quelques heures à aspirer la lourde fumée au milieu des vieux qui nous sourient en sirotant leur café. De quoi se prendre pour un écrivain orientaliste du début du 20eme. Mon nouveau pote me parle de Berlin ou il vit depuis 3 ans. Faut vraiment se prévoir un trip là bas les copains, ca à l'air énorme.
Le lendemain on se réveille tôt pour aller dans les souks de la vieille ville. Labyrinthe de ruelles blindées de monde. Chaque rue à sa spécialité, bijoutiers, fringues, savons (les savons de Tripoli sont réputés dans tout le Moyen-Orient), puis plus loin fruits et légumes et enfin viande. J'ai beau être carnivore militant je dois avouer que les énormes morceaux de bidoches exposés dans la rue ca fait un peu chelou. J'achète une bague et me débrouille pas trop mal au niveau marchandage. Je suis plutôt content de moi.
En sortant je tombe par hasard sur Elsa, une française rencontrée en soirée à Beyrouth, elle est avec une couchsurfeuse qui lui fait visiter là ville. Je reste avec elles, on va au souk des savons, on se ballade encore un peu puis direction la pâtisserie la plus connue de la ville. Là encore pétage de bide, les gâteaux sont fabuleux. On en commande une montagne au point d'être incapable de tout finir. Ca nous prend un bon moment de tout digérer, overdose de sucre.
La libanaise qui nous accompagnait rentre chez elle et Elsa et moi décidons de retourner se balader dans la vieille ville. La grande mosquée est ouverte, on peut la visiter mais Elsa doit passer une espèce de blouse à capuche. Ca ressemble un peu à la cape de sorcier d'Harry Potter, je me marre tout seul en l'appelant Hermione. La mosquée date de 1294, la cour intérieure est magnifique, on se regarde impressionnés, dire que j'ai failli quitter Tripoli sans l'avoir vu. Encore une fois nous avons droit à l'appel du muezzin, c'est magique. Le soleil se couche, les pierres deviennent roses, on reste une bonne demi heure, l'endroit est très calme, apaisant. Ca tranche avec le fourmillement des rues du souks à l'extérieur. Le gardien insiste pour nous prendre en photo partout, au moins Elsa aura un souvenir de son passage a Poudlard.
Dans le bus qui me ramène vers Beyrouth je somnole un peu en essayant de lire. J'espère revenir à Tripoli.

lundi 22 novembre 2010

Fête Nationale.

Aujourd'hui, 22 novembre, c'est la fête nationale au Liban. Célébration de l'indépendance en 1943, fin du mandat Français qui avait débuté à la suite de la 1ere GM. Les vainqueurs qui se partagent le Proche-Orient et tout ça, c'est plus ou moins l'intro du mémoire moisi que j'ai commis l'année dernière.
En France je suis fidèle à Brassens, la musique qui marche au pas cela ne me regarde pas, donc le 14 juillet c'est grasse mat', une pensée pour Léo Ferré et Perceval (le poisson rouge de la colloc') qui sont morts ce jour là... Plutôt crever que regarder le défilé. Mais ici je me suis dit que ca faisait partie de la découverte, et que j'aurais surement pas l'occasion de voir ça à nouveau. Donc ce matin réveil à 8h (dur), grosse tête dans le cul et dose massive de caféine. Je retrouve Alexis, le voisin suisse du dessus, qui m'apprend que la Confédération Helvétique à choisi dans les années 70 le 1er aout comme fête nationale sans que ca corresponde à un fait historique juste parce qu'ils ont percutés qu'ils avaient pas de fête nationale. Sur ce, en route vers le centre ville ou doit passer le défilé.
En arrivant aux abords de la place des Martyrs toutes les rues sont bloquées par des barrages de soldats qui nous empêchent de passer et nous éloignent toujours plus de la place. Après plusieurs tentatives systématiquement refoulées je commence à me regretter mon lit. Situations bizarres, personne dans les rues, on marche à 3 en plein milieu d'une grande avenue complétement vide que j'ai parfois mis un bon quart d'heure a traverser tellement il y'avait de bagnoles. On aperçoit d'autres français qu'on connait vaguement mais qu'on ne peut pas rejoindre à cause des barrages... Et toujours les soldats qui nous disent de continuer sur l'avenue de plus en plus loin de la place des Martyrs. Avec tous les mecs qui bloquent les accès je me demande si il va rester des gens pour défiler.
Bref on finit par retrouver les autres, et continue notre route vers Downtown avant d'obliquer vers la mer pour contourner la place et essayer d'y accéder par l'autre coté. Après une bonne marche on finit par trouver un endroit ou l'on peut s'approcher, portiques de sécurité, fouille des sacs, on me demande de faire une photo pour vérifier que mon appareil en est bien un. Vu qu'ici l'assassinat d'homme politique est quasi un sport national c'est pas vraiment étonnant. On arrive enfin au bord de l'avenue, très peu de monde, on doit être une quarantaine et la majorité sont étrangers, visiblement les libanais regardent le défilé a télé plutôt qu'en vrai.
Le truc c'est qu'on est vraiment tout à la fin du parcours, loin de la tribune officielle, donc quand les gens passent devant nous ils sont plus vraiment à fond, ca dépend des groupes en fait. Certains chantent et marchent au pas, appliqués, d'autres crient et rigolent, ca fait pas très sérieux. On voit passer plusieurs bataillons différents, sans vraiment savoir qui ils sont. Les chasseurs alpins ont la classe, skis sur l'épaule, tout en blanc, stylés vraiment. Les démineurs avec leurs chiens, les « CRS » avec casques et boucliers... Puis arrivent les sportifs, ceux du taekwondo en kimono, suivis par les escrimeurs qui défilent avec leur fleuret. Le Lions Club International (je sais pas ce qu'ils foutaient là), et les scouts aussi, en uniformes de scouts, assez bizarre. Beaucoup de véhiculer blindés ensuite, de l'auto-mitrailleuse à l'énorme char d'assaut, en passant les lance missiles... Je fais des photos de façon machinale en racontant des conneries à mon voisin. Puis arrivent les hélicoptères, une douzaine qui passent au dessus de nous, je pense à Apocalypse Now mais ne retrouve pas l'air de la chevauchée des Walkyries. En face de nous l'hélicoptère présidentiel se met en marche, le défilé est fini, le président va partir, le convoi arrive, une mercedes blindée entourée d'énormes 4x4. J'ai foiré la photo, elle est floue, on devine un mec qui monte dans l'hélico au milieux des gardes du corps. C'est con j'aurais peut être réussi à la vendre à un journal français...
Les militaires enlèvent les barrières, les gens s'en vont et on se dit qu'un vrai petit dèj serait une bonne idée. On remonte donc l'avenue du défilé, et on arrive devant la tribune officielle, on passe en plein milieux de tous les officiers en grande tenue qui serrent la main du chef des forces armées, il y'a les ambassadeurs de plein de pays qui montent dans leur voitures de luxe, l'Évêque de Beyrouth et le chef de l'église orthodoxe au Liban, j'ai fait un détour de 5 mètres pour pas passer sur le tapis rouge mais honnêtement je pense que j'aurais pu sans problème le traverser. Personne ne semble se demander ce qu'on fout là, sapés n'importe comment en train de faire des photos au milieux des officiels. Question sécurité c'est quand même assez moyen, c'était bien la peine de nous faire crapahuter deux plombes vu qu'à peine le défilé fini on s'est retrouvés au milieux de tous les officiers supérieurs de l'armée qui se mettent au garde a vous pour l'hymne national. On rigole cinq minutes, en se disant que quand même c'est franchement bizarre d'être là.
La matinée se finit autour d'un café et de quelques victuailles. Je fais plus ample connaissance avec les gens rencontrés au défilé grâce à Pierre, des français vraiment cool, étudiants en littérature arabe à l'université islamique de Beyrouth et une québécoise avec un accent à peine envisageable. Ça fait du bien de sortir du microcosme USJ/Forn el Shebbak. J'espère les revoir bientôt. Demain je pars 2 jours à Tripoli, la deuxième ville du Liban dans le nord du pays. Je vous raconterais tout ca en rentrant.

mardi 16 novembre 2010

Léger gavage.

Grande soirée sur le toit samedi soir. Beaucoup de français, quelques libanais, tous en commun d'être à l'USJ. Peu de gens que je connais, les quelques de l'immeuble, des visages croisés ici et là. Très vite les groupes se forment, quasi-imperméables. Je suis pas le dernier à m'enfermer, à vrai dire j'ai pas vraiment envie de parler. Discussions avec Alex, Elsa, Lilly et Pierre-Nicolas autour de la bouteille de vodka que nous avons acheté en commun.
Je les aime bien ces quatre là, vraiment, sympathiques, pas prise de tête et pas occupés à systématiquement juger ce qui les entoure. J'aimerais que ce soit le cas de tout le monde, vraiment, mais chez beaucoup il y'a cette manie très iepienne (et aussi des étudiants en science po. des facs) de toujours chercher à discuter ce qui les entoure pour formuler quelques sentences définitives sur le Liban, les gens, Beyrouth, le 14 mars, le hezbollah, le drapeau français qui était sur le toit, et tout ce qui peut donner l'occasion de placer les mots colonialisme, sionisme, islam, communauté ou n'importe quoi qui donne l'impression qu'on est super intelligent. C'est assez insupportable.
D'autant plus quand la majorité de ces gens là passent la totalité de leur temps entre français, sans sortir du quartier ultra chrétien de forn el shebbak, si ce n'est pour remonter la rue de Damas jusqu'à leur fac. Mais c'est pas grave, il sont politologues, ils ont compris le Liban.
J'évite de boire, pas envie que ca m'embrouille l'esprit et que je finisse par me laisser aller en oubliant ce que je pense d'eux. C'est dans ces moments là qu'on mesure que le syndicalisme étudiant et la fréquentation de tous les gauchistes de Toulouse n'est pas une bonne école pour s'adapter au « monde normal », la plupart des paroles m'insupportent, aucune envie de sympathiser avec ces gens qui font leur études dans une université à 3000$ l'année et crachent sur le système français, forcément pourri, sclérosé et archaïque sur le grand marché de l'enseignement supérieur mondialisé.
Le lendemain je suis remonté boire un thé, j'ai disparu de la soirée bien avant la fin. Verre pété, bouteilles laissées par terre, mégots partout, verres en plastique qui jonchent le sol. Bref un lendemain de fête normal, à la différence qu'ici personne ne viendra faire le ménage si ce n'est le « concierge » libanais, qui parle pas français, et dont tout le monde semble se foutre. J'ai ramassé les bouteilles vides avec Alex, que certains n'apprécient pas car il met parfois les gens face à leur contradiction et pratique un humour noir, décalé et acide qui ne semble pas à la mode. En attendant on a tout mis en sac, renoncé a ramasser tous les mégots qui trainent autour d'un cendrier vide et rangé les meubles que le concierge vient de se faire chier à peindre mais ou on se fout de péter un bouteille de bière voire d'écraser une clope.
Par terre j'ai trouvé les restes d'un billet de 1000 livres, brulé. On peut se prendre la tête pendant 15 jours pour savoir si le fait de mettre un drapeau français sur le toit pendant une soirée c'est du néocolonialisme (un mot décidément à la mode), par contre bruler de la thune dans un pays ou les réfugiés palestiniens vivent dans des bidonvilles et ou pas mal de gens galèrent à bouffer ca n'a rien de choquant, on si amuse en fin de soirée, Gainsbourg avait tellement la classe. Ca m'a filé envie de gerber.
Je me rends compte en relisant que tout ça n'est pas très gai, plutôt amer, voire aigri. Ne vous inquiétez pas, je vais bien, j'aime toujours le Liban. C'est juste un gavage passager, une boule au ventre que j'avais besoin de faire passer. J'ai juste compris qu'il y avait des choses plus ou moins intéressantes, des gens que je fuyais en France et que bizarrement je retrouve au Liban. Quelques conclusions à en tirer. Les fêtes de français sur le toit de l'immeuble, c'est plus vraiment la peine.

jeudi 11 novembre 2010

Flashs.

Fixer. Les photos servent à ca. Placer dans ma mémoire les images de Beyrouth. Depuis le toit de l'immeuble, dans les rues, les bars, la plage et et la mer méditerranée qui baigne la ville. Prendre le temps de faire une photo. Je m'y consacre pas assez. Pourtant c'est surement à ces moments que je pense le plus, et le mieux, que j'assimile et comprend un minimum ce qui se trame ici. Après tout une photographie arrête le temps non?

Les chrétiens du 14 mars (vaste regroupement de partis politiques pour former un joli gouvernement d'union désuni) tirent la sonnette d'alarme, c'était la une de L'Orient Le jour, le grand journal francophone. Pour qui? Pourquoi? Comme si l'alarme ne sonnait pas en permanence au Liban. Urgence. De vivre, de continuer, d'oublier. Urgence de reconstruire. De faire table rase. La grue comme symbole du Liban, j'en ai vu beaucoup mais encore aucun Cèdre. En même temps je suis pas vraiment sorti de Beyrouth.

Au coeur de la nuit j'oublie parfois, samedi soir, gros son, alcool et dancefloor queens. Les nuits sont différentes et toutes les mêmes. Il suffit d'y mettre du sien et la soirée peut se dérouler partout. Toulouse-Barcelone-Beyrouth... Quelle différence tant que les coeurs se réchauffent?

Le toit de l'immeuble, rendez vous incontournable pour les français du quartier, au point que certains ont hissé un drapeau au sommet. Mal à l'aise, j'ai bougé. Quelques bières, commentaires d'étudiants sous les étoiles et les lumières de Beyrouth de nuit. Presque à perte de vue. Là bas, derrière la ligne d'immeubles, il y'a la mer.

Coucher de soleil, les phares des voitures prises dans les gigantesques embouteillages de la ville. En contrebas une ambulance de la croix rouge prise dans l'immobilité du boulevard fait hurler sa sirène.
Presque 18h, déjà. Jaune, rouge, noir dans le ciel de la ville. Les façades de bétons changent de couleurs, les lumières s'allument. Dernière cigarette face au soleil, Alex à coté de moi me parle de sa vie en France, de l'iep d'Aix, de L'Unef, ou de Kaamelott, de Choron et Hara Kiri, de tout ce que nous partageons, même ici.

Barbecue à Ashrafieh, la colline au dessus de Gemmayze, immense appart un peu destroy, 3 terrasses, plusieurs salles de bain, et les braises qui crépitent. Grande discussion avec Pierre (un autre hein, je suis pas encore barjot) sur la chanson française. Plus tard il s'acharne sur son accordéon, Ginette des Têtes Raides dans la nuit Beyrouthine, envie de pleurer quand je l'écoute, il est super bon et ne m'en veut même pas de chanter faux le Léo des VRP. De toute façon je suis le seul à l'accompagner... Puis un slow sur le Toulouse de Nougaro. Nostalgie? Même pas. Terminé tous les deux dans l'appart vide à écouter Mano Solo en regardant le soleil se lever.

Premier cours d'arabe. Assis dehors, dans la rue, au milieu des passants et des cuistots du resto à coté en pause clope. Feras rigole en essayant de me faire prononcer les différents A de la langue. Pas évident, plusieurs sons n'existent ni en français ni en anglais, je galère bien entre les ha, aa, kha, ra... Ca viendra avec la pratique il paraît, en attendant je révise les jours de la semaine, les nombres, les mois, les couleurs... Et j'ai aussi appris a dire « je voudrais une bière fraiche. ». La base.

Il ne pleut toujours pas, même les libanais hallucinent, je suis tombé sur un automne exceptionnellement sec et chaud. Gilbert est inquiet pour nos sorties ski de l'hiver. Moi c'est surtout les coupures d'eau qui me gavent. Terminer une douche à l'eau minérale. Pas bien grave après tout.

Ca fait que des petits bouts, quotidien de petits bouts, dans un pays ou tout semble en petit bouts, la ville divisée en quartiers confessionnels, 18 religions, 18 petits bouts de Liban. Mais il y'a 24 poses sur mes péloches. 24 fois le temps d'essayer de comprendre.

jeudi 4 novembre 2010

Réflexions nocturnes.

Français à Monot, je suis là par hasard, appercu les gens depuis mon service, je suis descendu les rejoindre. Pas trop envie de rentrer de toute façon.
Hole in the Wall, trou dans le mur, bar pour étudiants étrangers, Almaza glacées et Jack pour moi, pourquoi est il meilleur ici qu'en France?
Dégripper les rouages, faire comme si, brulure dans la gorge à la première gorgée, ça ira mieux dès la deuxième, je m'en fait pas. Blind test avec Lully qui triche, Pink Floyds, Doors, Nirvana... 4-3 pour elle mais je conteste le score, la pierre de mon zippa rend l'âme, je me déchire le pouce à essayer de l'allumer.
Flics en patrouille, M-16, AK-47 qui ne sont plus des images dans counter strike mais bien réelles.
Ca crache du fer qui rentre dans la chair, ça tue des gens, ça assassine le Liban, ça n'a rien de romantique une arme.
Monot, près de la ligne verte, 16 ans de guerre, ligne de front. EAST-WEST Beirut. Civils qui cavalent pour fuir les balles et pas loin de nous immeubles dévastés par la folie furieuse d'un proche orient éclaté aurait dit Georges Crom, plutôt hardcore tout ça, pas très sympa, gorgée de Jack pour pas trop réfléchir. Marseille à gagné, 7-0, les français sont contents, merci Lucho.
Le serveur est membre des forces libanaises, parti chrétien pas cool du tout, impliqué dans Sabra et Chatila je crois, je me souviens plus. Il prend la tête à un mec du groupe, lui explique pourquoi le FN est le meilleur parti français. Il fait 100 kilos, je ferme ma gueule comme toujours depuis que je suis arrivé.
Taxe des clopes, mon paquet est fini, à 1$ le paquet ici on les lâche plus facilement. Un couple s'embrouille en anglais derrière nous, You are an asshole!!!, je sais pas ce qu'il lui à fait mais ca devait pas être cool parce qu'elle est salement véner. Leurs potes les séparent et le mec s'en va, dépité.
C'est indécent? Je me rend pas compte, boire des coups sur la ligne verte. Ce qui compte c'est la drague, les gens dansent, s'effleurent et parfois, quand ça marche, s'embrassent. Fond de rock old school, Born to be wild, un deuxième Jack? Pas ce soir merci, pas envie de boire.
Milices chrétiennes, Palestiniens, Chiites, Sunnites? Ca s'embrouille grave dans ma tête. Mention à ma licence, bonnes notes en Géopolitique du Proche-Orient, mémoire de master sur la politique libanaise pour m'apercevoir que j'y connais que dalle. Ici rien n'est pareil, mes bouquins ne servent à rien pour comprendre. Il est où Henri Laurence? Je capte rien à ce qui se passe bordel, pourquoi il m'explique pas. Quartier chrétiens, drapeaux des forces libanaises, un cèdre dans un rond rouge, sur fond blanc, aux balcons, dans les rues, tagués sur les murs. Un peu plus loin vers la place des martyrs il y'a le tombeau de Rafik Harirri et un grand portrait de son fils sur un immeuble. Il font comment pour s'y retrouver les libanais?
Au milieu de ça, des bars partout, des bloody mary, long island ice tea, shooters d'absynthe au comptoir pour les étrangers, le bar ressemble à n'importe quel autre que l'on touve en France... Boire pour oublier? Oublier, c'est ce qui semble être le mot d'ordre ici, les libanais parlent peu de la guerre, ou peut être que j'en connais pas assez, ou pas assez bien. A la réflexion c'est surement ça.
Beyrouth, bouge, se construit, se reconstruit, sans cesse en mouvement. Multidialectale et polymorphe. Elle change et se réinvente, elle renait, elle survit. Beyrouth ne meurt pas, elle pense ses plaies et continue, ne lâche pas l'affaire, jamais, les libanais y veillent. Et je suis prêt à parier un autre whisky que si je reviens dans un an tout aura changé. Sauf peut être la fête qui bat son plein passé 22h.
Je suis le seul clair de toute la bande, ça hésite ferme, on va en boite? Un mercredi? Mauvaise idée, je baille, je veux rentrer. Beyrouth vit la nuit. Moi pas encore, mais ca viendra si je fais pas gaffe, vampire libanais, ici Twilight est plus populaire que n'importe où.
Retour à pied en jouant au foot avec canette de bière allemande, marcher dans Beyrouth, hérésie, ici les gens prennent un taxi pour 800m. Rue de Damas, Ambassade de France protégée par des blindés, les soldats on l'air de se faire chier en nous regardant passer. Lilly juchée sur les épaules d'un mec, on raconte des bêtises, tout ça c'est pas bien grave. Les filles débriefent la soirée, cru comprendre qu'un mec plaisait à Cécile alors elle en discute avec Claire, c'est peut être pas du tout ça, ça m'intéresse pas vraiment. Le Real a arraché le nul à Milan malgré Pippo, trop de madridistes ici, je sais pas pourquoi. La Champions League c'est l'occaz pour moi de passer voir Joseph et Elie au Kamelot, je la rate jamais, on rigole bien. Parfois Gainsbourg chante dans la sono, on claque des doigts en rythme en regardant Cristiano Ronaldo se rouler par terre, Black Trombone.
Plus tard? Bouquin de Dantec, eau fraiche et sommeil, demain il fera beau sur le Liban...

mardi 2 novembre 2010

Jour de pluie.

 Hier matin réveil brumeux, vagues souvenirs de la veille, soirée au Torino avec Lilly. Retour en taxi tard dans la nuit en essayant de pas penser aux mélanges... Mon amant de St Jean chanté à tue tête dans les rues de notre quartier, franche rigolade... La ville écrasé de chaleur, nuage jaunâtre de pollution visible à l'oeil nu, paysage qui se trouble dès qu'on regarde au loin, pas un souffle de vent. Difficile de respirer, ca m'a pris à la gorge dès que j'ai ouvert là fenêtre. Ca plus le mal de crane la journée semblait promettre beaucoup... Englouti deux litres de flotte avant de me coller sous une douche froide, de toute façon l'électricité était coupé y'avait pas d'eau chaude...
Filé à la corniche respirer un peu l'air de la mer, assis sur un banc plein de mosaïques à la Gaudi, j'ai bu un thé a la menthe en regardant les gens qui faisait leur footing, admiratif, car même assis sans bouger je dégoulinait de sueur et j'avais du mal à respirer... Bientôt c'est le marathon ici, je suppose que des gens le prépare...
Par contre ce matin le ciel était bleu, il faisait beau, rien ne laissait présager l'orage. J'ai gagné le comptoir du Camelot à pied, une bonne demie heure de marche et quelques photos pour relever mes mails, checker Elie mon pote serveur et chercher sur le net des cours d'arabe abordables. Pas installé depuis 10 minutes que l'orage éclatait. J'avais bien vu quelques nuages sur la mer en arrivant mais il y'en a souvent... Gemmayzé sous la pluie, la grosse pluie, un orage d'été qui dure dix minutes mais coupe l'électricité dans le bar. Ben voilà, il pleut ici aussi, je commençais à en douter.
A part les orages violents, le ciel est toujours bleu, rien ne laisse présager qu'on est déjà début novembre. La seule différence notable est que en soirée il faut mettre un sweat pour rester dehors, ma veste en cuir tire la gueule sur porte manteaux.
J'attendais la réponse d'une colloc plus proche du centre, moins cher et plus grande que mon appart, mais la réponse ne vient pas malgré mes relances, je vais donc laisser tomber, je suis pas mal à forn el shebbak de toute façon. Puis si par hasard le mec de l'annonce se réveille il sera toujours temps d'aviser.
Gouté le vin libanais, du Ksara, château Le Prieuré, un cabernet sauvignon qui se retrouve dans la Bekaa grâce aux français et qui est plutôt bon, meilleurs que beaucoup de Gaillac et de Cahors qu'on rencontre dans les soirées toulousaines. Bon par contre il tire un bon 14° et tabasse quand même pas mal, faut faire gaffe. J'ai aussi gouté l'Arak, qui passe pour la boisson nationale, une anisette proche de celle de beaucoup de pays méditerranéens (Grèce et Turquie pour ce que je connais...). Honnêtement j'accroche pas trop. Par bonheur la plupart des bars ont du Fernet Branca, ce qui me permet de boire des fernet-coca en souvenir du bon vieux temps au 23rdQ. Parfois quand je suis sur la corniche je bois un ptit Ricard face à la mer. Voilà pour le chapitre festif, et avec le week end de trois jours Beyrouth était assez festive... Au Torino une fille m'a payé un verre de rosé en me disant c'est ca que tu vas trouver au Liban, des jolies filles et de l'alcool... C'est pas exactement ce que je suis venu chercher mais bon, je suis pas un garçon contrariant... Quoi qu'il en soit la vie nocturne est assez folle ici, les bars sont pleins, les gens font la fête tous les soirs. Du moins dans les trois quartiers qui semblent voués essentiellement à la nuit, Hamra, Monot, Gemmayzé...
Sinon tous les cours d'arabe que j'ai vu sont assez chers, je continue de chercher mais c'est pas évident, je pense que je vais me retrouver à la mission culturelle française qui en propose un peu moins cher que les écoles privées et qui en plus à l'avantage d'être accessible à pied depuis chez moi. Le point négatif c'est que c'est pas avec ça que je vais rencontrer des libanais. Joseph, le serveur du Camelot joue au Handball, je suis entrain de voir si il serait possible de rejoindre l'équipe, là encore plus pour socialiser que pour le jeu, j'ai des doutes sur mon niveau après tout ce temps, mais je dois encore être capable de dépanner sur une aile...
Une petite photo pour finir, même si elle est pas de moi : « Beyrouth ne meurs pas. »